JUSTICE
Le 29 juillet dernier, Samya, 28 mois, tombait par la fenêtre du domicile parental au 6e étage d'un immeuble de Belley. L'enquête des gendarmes et les révélations de l'entourage ont permis de mettre en cause une jeune femme hébergée par la famille
Katherine Torcy, une jeune femme de 36 ans originaire d'Auxerre, est détenue à la prison de Corbas. Mise en examen pour homicide volontaire, elle serait la meurtrière présumée de la fillette de 28 mois, décédée le 29 juillet dernier, à Belley, en chutant d'une fenêtre du domicile parental, au 6e étage d'un immeuble de Belley. La jeune femme, confondue par des expertises techniques des enquêteurs et les doutes de son propre entourage, a finalement reconnu les faits, en précisant qu'elle ne pouvait pas les expliquer.
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Un meurtre gratuit, un infanticide? Au terme d'une journée de garde à vue, Karine Torchi a avoué l'impensable, un geste fou commis en quelques secondes, et pour lequel elle n'aurait pu livrer le moindre début d'explication.Elle a été mise en examen avant d'être écrouée à la maison d'arrêt de Corbas (Rhône) pour le meurtre de Samya, 27 mois, le 29 juillet dernier à Belley.
Pas de vengeance ni de ressentiment envers l'enfant ou sa mère dont elle se disait la meilleure amie. L'affaire promet déjà des débats intenses aux criminologues et experts psychiatres. De mémoire de magistrat et de gendarme, un tel meurtre d'enfant, c'est même du jamais vu. C'est pourtant un accident qui semblait s'être produit le 29 juillet, à 19 h 30, dans la petite cité du Clos-Morcel à Belley dans le Bugey (Ain). Un de ces drames qui ne sont pas si rares, quand un enfant en bas âge profite d'un moment d'inattention de ses parents pour escalader un balcon ou grimper sur une chaise, et bascule dans le vide.
Ce jour-là, Karine Torchi passait la journée chez Vanessa Rougris qui l'hébergeait depuis quelques jours dans son appartement. Au sixième étage du 198 de l'avenue du 8 mai 1945. Vanessa connaissait le passé délinquant de cette personne qui avait été sa voisine sept ans plus tôt avant de partir à Auxerre. « Elle était d'ailleurs kleptomane et volait des choses dérisoires… », se souvient la mère de la fillette. Mais elle l'avait prise en pitié.
Quand le drame s'est produit, Vanessa était dans sa cuisine et sa fille Samya, âgée de vingt-sept mois, jouait sur le lit de sa chambre, contiguë au salon. Karine Torchi a avoué aux gendarmes qu'elle s'était alors précipitée sur la fillette, l'avait saisie par les hanches avant de la jeter dans le vide. Les pompiers, arrivés dans les minutes qui suivaient, avaient tenté l'impossible. En vain.
Karine Torchi, elle, était venue rejoindre la mère comme si de rien n'était. Avant de soutenir la famille endeuillée et même de participer à l'enterrement. Sans jamais verser une larme. Son attitude avait troublé.
Surtout, la thèse de l'accident n'a pas tenu longtemps. La chute par la fenêtre du salon, avec un store presque entièrement baissé et une chaise trop éloignée, était impossible comme l'a prouvé une reconstitution avec le fils d'un voisin. Et un témoin avait clairement vu la fillette basculer de la fenêtre de la chambre qu'elle n'aurait pas pu atteindre seule…Karine Torchi s'est rapidement retrouvée dans le viseur de la brigade des recherches de Belley. Et ses violences passées, à l'égard d'autres enfants, les ont confortés dans leur intuition.
Mais cette femme de 36 ans, elle-même mère de trois enfants, avait expliqué qu'elle n'y était pour rien. « Elle a même juré sur la tombe de son enfant mort-né, se souvient avec dépit Vanessa Rougris. Une tombe qui est juste à côté de celle de Samya. Karine Torchi est donc rentrée chez elle à Auxerre et n'a plus donné de nouvelles.Jusqu'à mardi dernier. Les gendarmes l'ont interpellée et placée en garde à vue avant de perquisitionner son logement. Et au bout de quelques heures d'audition, elle a craqué et révélé l'impensable.
Karine Torchi Il reste maintenant à comprendre cet acte insensé qui a plongé toute une famille dans un deuil infini
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150 personnes ont défilé avec la famille de Samya, la fillette de 2 ans défenestrée le 29 juillet(extrait de presse)
Hier, les portes du ciel se sont ouvertes pour laisser entrer Samya. La date de cette marche du souvenir n'a pas été choisie par hasard : selon la tradition musulmane, c'est le quarantième jour après le décès que l'âme du défunt gagne enfin le repos éternel.
Vers 19 heures, cent cinquante personnes étaient rassemblées devant le palais de justice de Belley, à l'appel de sa famille, pour lui rendre un dernier hommage. Pas de banderoles ou de tracts pour cette marche silencieuse, mais une grande dignité. L'entourage de la famille, des voisins du quartier du Clos-Morcel, des habitants touchés par le drame, sont venus défiler dans le calme. Vanessa Rougris, la mère de Samya, est arrivée entourée de sa mère, de ses sœurs, de ses deux enfants, et de Machdi Jendoubi, le père de la fillette, tous tenant un bouquet de fleurs blanches à la main. Portant la djellaba noire du deuil, les cheveux tenus par un voile, elle a été tout de suite très entourée, recevant les condoléances de proches ou d'anonymes venus témoigner de leur compassion.
C'est le visage baigné de larmes que la maman de Samya a ouvert une marche dans les rues de la ville. Un masque de Mater dolorosa, d'une peine insondable, qui ne l'a pas quitté pendant les trois quarts d'heure de ce périple circulaire. À ses côtés, main dans la main, se trouvaient Brigitte, Rose et Mickaël, les sœurs et le frère de Karine Torchi, celle qui a avoué mardi l'innommable. Une fratrie qui avait eu de forts soupçons sur l'implication de leur sœur aînée, et avait aidé les gendarmes de Belley à la confondre.
Le 29 juillet dernier, quand Samya avait chuté du sixième étage, tout le monde avait pensé à un accident. Avant qu'un mois après, Karine Torchi, une amie de Vanessa Rougris, explique qu'elle avait saisi cette fillette de vingt-sept mois par les hanches avant de la précipiter dans le vide.
Un acte insensé qui n'a toujours pas d'explications, même si beaucoup rappelaient hier que la personnalité pathologique de Karine Torchi aurait peut-être pu alerter plus tôt : « Tuer un enfant et rester avec la famille, sans verser une larme, c'est le plus choquant, c'est immonde » s'indignaient Céline et Nadège, dans le cortège. José et Jeanine Fernandes, eux, en voulaient « à celle qui a détruit une famille ». De retour au palais de justice, le père de Samya a seul trouvé la force de dire quelques mots à ces proches ou anonymes venus par solidarité : « Nous remercions tout le monde d'être venu nous soutenir, surtout la famille de l'accusée. Sans elle, on n'aurait pas fait grand-chose… »
Une « accusée » dont il va falloir maintenant percer le mystère d'un passage à l'acte. Connue pour être voleuse et kleptomane, et soupçonnée d'avoir déjà commis des violences sur des enfants, elle devra répondre désormais du pire des crimes. Le meurtre d'un ange qui vient de gagner le paradis.